regretter ses dons

J’aimerais partager avec vous mon expérience pour vous éviter de vivre les mêmes regrets que moi quand je découvrais anxieusement que, pendant des années, j’avais pris une mauvaise décision en faisant des dons à mon organisme de bienfaisance préféré.

La fondation Make-A-Wish aide les enfants atteints de maladies terminales à réaliser un grand souhait. Ils peuvent, par exemple, emmener l’enfant et sa famille à Disneyland. Les histoires de ces enfants sont ensuite relayées à travers leurs supports de communication. Ces histoires sont vraiment touchantes. Je leur ai succombé et j’ai fini par faire un don régulier, voulant aider ces enfants à profiter d’une vie meilleure.

Cependant, mon très bon ami Max Harms m’a fait remarquer que la fondation Make-A-Wish gagne 300 millions de dollars par an en diffusant ces histoires. Notre cerveau est paramétré pour produire des émotions positives au contact de ce genre de récits et c’est pour cela que des gens comme moi finissent par leur faire des dons.

Par contre, Max m’a proposé la fondation Against Malaria qui achète des moustiquaires pour protéger les enfants des pays en développement contre le paludisme. Mon objectif d’aider les enfants à bénéficier d’une vie meilleure ne serait-il pas mieux atteint en les protégeant de la mort?

Cette question m’a arrêté dans mon élan. Je devais prendre le temps de m’expliquer pourquoi j’avais fait des dons à Make-A-Wish. Je me suis rendu compte que c’étaient leurs histoires attendrissantes et leurs tactiques marketing affûtées qui avaient attiré mon attention. Nos cerveaux se focalisent sur ce qui retient le plus notre attention, pas forcément sur ce qui correspond réellement à nos objectifs. C’est ce qu’on appelle un biais attentionnel.

Entre-temps, je n’avais pas considéré les histoires des enfants sauvés du paludisme. J’ai donc imaginé un enfant en particulier, Marie, qui n’avait pas été atteinte de la malaria grâce à ma donation. J’ai visualisé Marie bercée par sa mère le soir. J’ai imaginé son premier jour à l’école. Son cinquième anniversaire avec sa famille toute rassemblée. J’ai vu Marie grandir, devenir adulte et fonder une famille. Ma dernière image mentale était celle de Marie tricotant sur sa chaise à bascule et écoutant les rires de ses petits-enfants.

C’était merveilleux d’imaginer la vie de Marie. Au lieu de faire don à une seule histoire attendrissante via Make-A-Wish, je pouvais donner à Marie une longue vie d’histoires attendrissantes. De plus, une moustiquaire coûte très peu, alors qu’un voyage à Disneyland peut être onéreux. Pour le prix d’un voyage à Disneyland, je pouvais sauver Marie, John, Ella, Sergio, Paula, Sarnur, Christian et tant d’autres. C’était comparer l’incomparable.

Quoi qu’il en soit, je n’ai rien contre la fondation Make-A-Wish. Ils respectent leur engagement. C’était un manque d’imagination de ma part qui m’avait fait prendre une mauvaise décision. Suite à cette expérience, j’ai appris que les organismes les plus efficaces par rapport à mes objectifs sont souvent ceux avec les histoires les moins attrayantes et de ce fait, elles ne sont jamais financées.

Max m’a ensuite parlé de l’altruisme efficace, un mouvement spécifiquement fondé pour corriger ce genre d’erreurs de pensée. Ils utilisent des stratégies axées sur l’analyse des données pour promouvoir les organismes de bienfaisance qui ont l’impact le plus positif. Il m’a conseillé de consulter Givewell en particulier, un organisme qui sélectionne les charités les plus efficaces, recherche à l’appui. Il a également suggéré The Life You Can Save. Ce site fournit un calculateur d’impact qui vous permet d’estimer instantanément l’impact que peut avoir la somme que vous donnez.

J’étais conquis! Je ne voulais plus jamais connaître cette sensation de profond regret. La prochaine fois que vous entendez ou lisez une histoire touchante d’une charité qui vous émeut, arrêtez-vous dans votre élan et pensez à considérer des alternatives plus efficaces. Comment votre argent pourrait-il être mieux utilisé pour produire un impact plus puissant?

J’espère que mon expérience vous aidera à éviter de regretter vos donations à l’avenir et à adopter un altruisme vraiment efficace.